Ces scientifiques de la très célèbre BUCM — l’Université de Médecine chinoise de Pékin — sont depuis cinq jours en résidence à la Station biologique de Paimpont. Ce groupe est composé de cinq chercheurs du laboratoire de neurophysiologie de cette université. Ils sont accompagnés de leur responsable, Madame Wurhan Chang Song Li, qui nous apprend que le massif forestier de Paimpont a attiré son attention après qu’elle a pris connaissance de la série d’articles sur « Les Arbres remarquables » parue dans l’Encyclopédie de Brocéliande. Dans un français maitrisé, Madame Wurhan précise qu’elle est enchantée de revenir en France pour explorer avec ses collègues ce site merveilleux qu’elle a connu il y a une vingtaine d’années, lors de ses études à l’Université de Rennes 1.
Nous savions depuis longtemps que la forêt de Brocéliande est en effet riche d’arbres qui par leur taille ne passent pas inaperçus, d’autant moins sans doute qu’ils sont, par ailleurs, pour beaucoup d’entre eux légendaires. Mais le déplacement de six scientifiques spécialisés en neurophysiologie venant de l’autre bout du monde ne cesse d’intriguer. Madame Wurhan nous explique que dans la médecine chinoise l’arbre tient une place particulière en tant que ressource pour soigner de nombreux soucis de santé et certains troubles du comportement. Ce dernier point explique peut-être la présence de chercheurs en neurophysiologie. Et chacun de penser aux supposés pouvoirs aphrodisiaques d’extraits de certains arbres ; qui n’a pas entendu parler du très fameux « Bois bandé » utilisé aux Antilles ? Nos visiteurs chinois ne se seraient-ils pas trompés en venant dans notre contrée où, sauf erreur, même Merlin n’a jamais songé à créer quelque philtre d’amour à partir des arbres du coin.
Or nous venons d’apprendre lors de la présentation des résultats de leurs travaux, qu’après avoir prospecté dans tous les recoins de la forêt en utilisant les informations contenues dans les articles de l’Encyclopédie de Brocéliande, en particulier celles relatives aux chênes blancs (Quercus robur) ces Chinois chercheurs, au demeurant fort sympathiques, concluent en notant, sans ambigüité qu’ils ont trouvé leur bonheur. Ils auraient repéré un spécimen rare, pour ne pas dire unique en Europe en bordure de la forêt. Ils précisent que cet arbre possède dans son écorce des vertus à la fois susceptibles de soigner les troubles du comportement et de participer à la régénération des cellules souches. Par ailleurs l’âge très avancé de ce chêne lui a permis de concentrer, dans son tronc et ses branches, une énergie colossale dont le rayonnement apaise tout individu transportant sur lui une infime parcelle de son bois.
Le rapport conclut sur la nécessité de transformer en poudre toute l’écorce du chêne, puis de débiter tronc et branches pour constituer ultérieurement des « sticks d’énergie » individuels destinés aux personnes stressées. Madame Wurhan indique que sans attendre leur retour en Chine un contact a été pris avec l’Université forestière de Pékin pour engager les crédits nécessaires à l’abattage de ce chêne creux plusieurs fois centenaire et à son remplacement par un « chêne ayant les mêmes proportions, le même aspect ». Madame Wuhran poursuit « de plus il ne demandera aucun entretien puisqu’il sera artificiel mais en tous points identique à l’original. Les touristes s’y méprendront ». Quel est ce fameux chêne ? Lui a-t-on demandé. Madame Wurhan n’a pas souhaité nous répondre sur ce point. « Quant au prix, il est sans importance pour nous » nous a-t-elle dit les yeux dans les yeux : « La science n’attend pas ». Cette rentrée d’argent inespérée devrait permettre à une petite commune morbihannaise de pouvoir enfin restaurer son église.